La « Dame » des glaces éternelles

Le permafrost a surpris les scientifiques. Pour la première fois en 112 ans, une carcasse de mammouth a été découverte, probablement une femelle, remarquablement bien conservée. A partir de l’état des dents, les scientifiques ont déterminé que ce mammouth a vécu entre 50 et 60 ans. L’état des tissus et du squelette est presque parfait. De plus, c’est la première fois que du sang liquide est découvert chez un si vieil animal.

Une expédition des scientifiques de l’Institut d’écologie appliquée de l’Université du nord-Est et la Société géographique russe a eu lieu dans les îles Lyakhovsky de l’archipel de Novossibirsk, qui se trouve dans l’océan Arctique. Sémion Grigoriev, directeur de l’Institut et chef de l’expédition, s’est exprimé sur la découverte au micro de La Voix de la Russie :

« Le mammouth a été découvert en août dernier. Le 9 mai, nous nous sommes rendu sur place et avons commencé à creuser. La moitié de la carcasse manquait, mais nous avons eu beaucoup de chance avec la seconde moitié. Elle gisait dans la glace à faible profondeur, de sorte que les membres inférieurs et le ventre de l’animal sont restés en très bon état. Des fragments de tissu musculaire, que nous avons découverts hors du corps, avaient la couleur rouge naturelle de la viande fraîche. De plus, dans les pores gelés sous le ventre, il y avait un liquide rouge foncé. Et quand nous avons cassé ces pores à l’aide d’un pic, ce liquide s’est mis à couler. Cela est d’autant plus surprenant que la température de l’air sur le site était alors de moins 7 degrés Celsius ...»

Selon la théorie du professeur de physiologie Kevin Campbell de l’Université canadienne de Manitoba, l’hémoglobine dans le sang des mammouths avait la capacité de transporter l’oxygène, même à de très basses températures.

« Il est possible que la récente découverte permette de prouver cette hypothèse», estime Grigoriev. Très prochainement, des scientifiques de différentes spécialités : paléontologues, microbiologistes, biochimistes, physiologistes vont procéder aux analyses. Tout d’abord une analyse bactériologique sera faite pour détecter la présence d’infections particulièrement dangereuses. Les chercheurs pensent que l’analyse du sang et des tissus fournira des renseignements scientifiques précieux. Selon Grigoriev, la valeur de cette découverte réside dans le fait que c’est la première fois qu’est découverte la carcasse d’un mammouth femelle dans un état de conservation aussi exceptionnel.

« Une telle découverte est inédite dans l’histoire de la science paléontologique. L’étude des restes du mammouth fournira des données scientifiques très précieuses sur les caractéristiques du développement du système reproducteur de ces animaux. L’âge sera déterminé par datation au radiocarbone, mais nous supposons que le mammouth a vécu il y a entre 10 et 15 mille ans. A cette époque, le climat s'est réchauffé de façon spectaculaire, et ces îles se sont séparées du continent. Nous ne savons pas ce qui a causé la mort de l’animal : manque de proie, accident ou mort naturelle, mais nous avons pu déterminer qu’il s’agissait d’une « dame âgée » à partir de ses dents... »

En juillet, des scientifiques étrangers se joindront aux recherches. Il n’est pas à exclure que des spécialistes coréens et japonais envisagent à nouveau la possibilité de cloner un mammouth.