Les rebelles syriens : de véritables démocrates ?

Parmi les rebelles syriens, peu nombreux sont ceux qui partagent les valeurs démocratiques et souhaitent vivre dans un État laïque. Telle est la conclusion du chef de la Commission d’enquête indépendante sur la Syrie Paulo Sergio Pinheiro. Il présentera la semaine prochaine un nouveau rapport. « Ils ont des aspirations différentes. Ce sont des militants pour la démocratie qui croient en l’idéal syrien, en un Etat laïque. Ils sont une minorité ».

« C’est positif qu’on commence à se rendre compte de la véritable situation en Syrie. Evidemment, parmi les opposants au régime actuel, il y a des gens qui militent pour la démocratie, les droits et les libertés. Mais la crise actuelle a mis au premier plan ceux qui sont loin des idéaux démocratiques », explique le vice-président du Comité russe de solidarité avec les peuples de la Syrie et la Libye Israël Shamir. « Parmi eux, il y a des voyous, des voleurs et des mercenaires qui luttent pour leur propre profit, et des extrémistes islamiques, formés en Arabie saoudite et au Qatar. Les membres de la vraie opposition qui critiquaient le régime avant le début de la crise (on les appelle « opposition intérieure »), soutiennent l’idée du dialogue, mais l’opposition extérieure ne les prend pas au sérieux ».

De nombreux experts soulignent que les rebelles syriens qui parlent de leur intention construire un Etat démocratique en Syrie, ont toutes les possibilités de le faire. Ils contrôlent certains territoires, notamment à la frontière avec la Turquie. On peut y établir un ordre démocratique, réaliser des élections pour les collectivités locales et d'autres procédures visant à stabiliser la situation politique. Cependant, seules des images de nettoyage ethnique arrivent de ces régions, avec des massacres et des flagellations.

« Lorsque nous allons faire participer des organisations de la défense des droits de l’Homme sous le gouvernement actuel, lorsque nous nous débarrasserons du régime criminel, nous pourrons nous pourrons faire face à toutes les violations des droits de l'Homme. Nous allons enquêter sur tous les crimes, même les crimes de ceux qui ont pris les armes pour se protéger eux-mêmes et protéger leur famille », explique Ahmad Kamil, membre du bureau de presse de l'opposition Coalition nationale dans un entretien accordé à La Voix de la Russie.

Cependant les experts doutent de la sincérité de ces intentions. Ce n'est pas un secret que l'épine dorsale de la Coalition nationale, ce sont les Frères musulmans. Et leur arrivée au pouvoir ne risque pas de provoquer l'avènement de la démocratie en Syrie.

« Les allégations selon lesquelles les rebelles vont créer la démocratie ou la Charia, c’est un mensonge. Les habitants locaux affirment que les rebelles pillent tout ce qu’ils trouvent et le vendent en Turquie. Il est donc préférable de qualifier ce qui se passe en Syrie de pillage banal », poursuit Israël Shamir. « Les rebelles se règlent des comptes entre eux, le tout sous le couvert des slogans islamistes. Je ne partage pas les craintes des fonctionnaires de l'ONU que les rebelles voudraient établir la Charia si le régime d’Assad chute. La Charia – c’est avant tout la création d’une base juridique. Je ne peux pas dire que tous les Syriens aimeront ce régime, mais on peut vivre sous ce régime. Le problème – c’est que le pouvoir des rebelles actuels – c’est du banditisme ».

Difficile d'imaginer que les tueurs d’hier, des racketteurs et des gangsters d'hier, en arrivant au pouvoir, puissent tout à coup défendre les valeurs démocratiques et les droits de l’Homme.